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L’empressement de Marie

L’empressement de Marie
- Par le père Dinh Anh Nhue Nguyen, o.f.m. Conv., secrétaire général de l'Union pontificale missionnaire

QUATRIÈME DIMANCHE DE L’AVENT (ANNÉE C)

Mi 5,1-4a ; Ps 79 ; He 10,5-10 ; Lc 1,39-45

L’empressement de Marie

Les lectures de ce dernier dimanche de l’Avent nous aident, à nous préparer avec Marie, Mère du Christ, à accueillir ensemble le Seigneur qui vient. La parole de Dieu nous invite à tourner notre regard vers le mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu, l’envoyé du Père « pour nous et pour notre salut », comme nous le disons dans le Credo. Dans le cadre de la mission du Christ, nous sommes également appelés à réfléchir sur Marie, le modèle de tout croyant pour porter le Christ aux autres. À cet égard, trois points sont significatifs pour notre cheminement spirituel missionnaire.

1. « Je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté ». C’est ainsi que le Christ déclare solennellement sa mission « en entrant dans le monde » (Lettre aux Hébreux). Dans son imagination, l’auteur sacré rapporte les toutes premières paroles que le Christ, le Fils de Dieu, prononce au moment d’entrer dans le monde, au moment de son incarnation. Et c’est ce que le Christ répétera à chaque instant de sa vie terrestre. Ainsi, dans l’épisode de la rencontre avec la Samaritaine, il déclare à ses disciples qui s’inquiètent de la faim de leur Maître : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre. » (Jn 4,34). Dans le célèbre discours sur le pain de vie, il précise encore sa mission : « Car je suis descendu du ciel pour faire non pas ma volonté, mais la volonté de Celui qui m’a envoyé. » (Jn 6,38). Enfin, dans l’agonie de Gethsémani, avant sa passion et sa mort, il a lutté de tout son être, à la sueur et au sang, pour rester fidèle à la seule mission de sa vie : faire la volonté du Père qui l’a envoyé. Il a prononcé des paroles émouvantes: « Abba… Père, tout est possible pour toi. Éloigne de moi cette coupe. Cependant, non pas ce que moi, je veux, mais ce que toi, tu veux ! » (Mc 14,36).

Face à ce qui s’est passé dans la vie du Fils de Dieu, nous, ses disciples-missionnaires, sommes également appelés à réfléchir, alors que nous nous préparons à la célébration de la naissance de Jésus, et à répondre sérieusement et sincèrement à une question fondamentale : quelle volonté fais-tu dans la vie et en toute chose ? La tienne ou celle de Dieu ? Toi qui pries comme Jésus nous l’a enseigné : « [Notre Père] que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel », fais-tu sa volonté dans ta vie ? Comment puis-je discerner clairement ce que Dieu veut de moi et pour moi dans la vie et à ce moment précis ?

2. À cet égard, l’enseignement de saint François d’Assise est éclairant, il commente ainsi l’invocation du Notre Père :

QUE TA VOLONTE SOIT FAITE SUR LA TERRE COMME AU CIEL, que nous t’aimions de tout notre cœur en pensant toujours à toi ; de toute notre âme en te désirant toujours ; de tout notre esprit en dirigeant vers toi tous nos élans et ne poursuivant toujours que ta seule gloire ; de toutes nos forces en dépensant toutes nos énergies et tous les sens de notre âme et de notre corps au service de ton amour et de rien d’autre. Que nous aimions nos proches comme nous-mêmes ; en les attirant tous à ton amour selon notre pouvoir, en partageant leur bonheur comme s’il était le nôtre, en les aidant à supporter leurs malheurs, en ne leur faisant nulle offense.

En bref, la volonté de Dieu pour moi est que je l’aime de tout mon être et que j’aime mon prochain comme moi-même à chaque instant de ma vie. En d’autres termes, la volonté de Dieu à notre égard, comme le suggère saint François, est toujours et dans tous les cas, indépendamment de l’âge, de l’état de vie, de la vocation et de la profession, l’amour pour Lui et l’amour pour les autres, ce qui implique avant tout d’ »attirer tout le monde de toutes nos forces » à l’amour de Dieu. Et c’est ce double amour que Dieu veut de nous, dans et au-dessus de tout, de tout sacrifice, de toute bonne œuvre, comme il le demande explicitement : « Je veux la miséricorde, non le sacrifice » (cf. 1Sam 15,22; Os 6,6; Mt 12,7). C’est pourquoi notre mission dans la vie reste toujours celle de l’amour, qui doit attirer tout le monde vers l’amour de Dieu dans le Christ. C’est la mission d’amour que sainte Thérèse de Lisieux, patronne des missions, a accomplie et qu’elle rêvait de poursuivre depuis le ciel. Une question concrète se pose : Ressens-tu l’élan de l’amour du Christ en toi pour le porter aux autres et pour amener les autres à Lui, comme saint Paul s’est exclamé un jour : « L’amour du Christ nous saisit » (2Co 5,14) ?

3. Dans cette perspective, nous pouvons entrevoir le sens profond de l’action de Marie, décrite au début de l’évangile: « Marie se mit en route et se rendit avec empressement ». Pourquoi cet « empressement » de Marie ? Était-ce parce qu’elle était curieuse de vérifier les informations données par l’ange sur l’état d’Élisabeth ? Peut-être pas, car Marie était « celle qui a cru », comme elle le fera remarquer plus tard. Peut-être parce qu’elle voulait apporter de l’aide à sa cousine enceinte dans sa vieillesse ? Mais il y avait certainement déjà pas mal de serviteurs et de servantes dans la maison de Zacharie, appartenant à la classe sacerdotale de l’époque.

Ainsi, la force principale qui a poussé Marie à « se mettre en route et se rendre avec empressement » doit être interprétée en relation avec ce qu’elle a déclaré à Dieu par l’intermédiaire de l’ange : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. » (Lc 1,38). C’est la parole qui concerne non seulement ce moment précis de l’accueil du Fils de Dieu dans son sein, mais aussi toute sa vie, qui est ainsi devenue une mission constante, devant le Seigneur, toujours sous le signe du « que tout m’advienne selon ta parole ! », c’est-à-dire « selon ta volonté ! ». Et de même que le Christ, en affirmant « Me voici, je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté », est envoyé par le Père à la mission dans le monde, de même Marie, la mère du Christ, après avoir déclaré « Me voici » (comme Isaïe et d’autres prophètes), est « envoyée » avec son Fils à tous, à partir de la première visite à Elisabeth avec Jean le Baptiste dans son sein.

Ainsi, l’empressement de Marie sera l’expression de sa disponibilité, de sa sollicitude et de sa joie à remplir la mission qui lui a été confiée. Elle entreprend de partager joyeusement avec d’autres, à commencer par ses proches, les « grandes choses » du salut que le Dieu tout-puissant a commencé pour tous en elle et en Elisabeth. Mais il ne faut pas s’imaginer que la « route » de la mission de Marie, de Nazareth à la « région montagneuse » de Judée, a été facile pour elle, jeune femme dans une douce attente ! La distance était grande (plusieurs jours à pied ou sur l’âne) et les routes n’étaient certainement pas lisses. Il y avait aussi le risque de rencontrer des bandits de grand chemin sur la route, ce qui arrivait à l’époque (la parabole du Bon Samaritain, Luc 10, 25-37). Mais tout cela, fatigue ou danger, n’était en rien comparable à la joie que Marie avait en elle et qu’elle voulait partager. Et c’est peut-être pour cela que l’évangéliste passe sous silence les détails du voyage pour se concentrer sur la description de la rencontre joyeuse entre les deux mères, avec l’image de « l’enfant qui tressaillit» dans le ventre d’Élisabeth à l’accueil de Marie. Cela nous donne un aperçu du point central de l’histoire : Marie, qui porte Jésus à l’intérieur, remplit de joie Élisabeth et son enfant, et cela déjà par sa simple salutation. Mission accomplie !

Le voyage de Marie devient symboliquement la mission que nous tous, disciples du Christ, sommes appelés à accomplir aujourd’hui encore, car Noël est à nos portes : se lever et partir « avec empressement » avec Jésus dans le cœur, vers les proches et les lointains, pour insuffler à tous la sainte joie que seul Dieu peut donner par sa présence. Et ce, malgré toutes les difficultés, les adversités, les souffrances qu’il y a sur la route, car la joie que nous portons à l’intérieur pour la partager est plus grande que tous les problèmes que nous rencontrons, à l’extérieur ou à l’intérieur ! Marie a vécu tout cela sur le chemin de sa vie, et c’est pourquoi elle comprend et accompagne les missionnaires du Christ dans leur mission. Après tout, c’est en fait une participation à la mission du Christ d’apporter au monde la joie et le salut de Dieu. Que chaque chrétien renouvelle son zèle pour cette mission, en répétant les paroles du Christ au moment de son entrée dans le monde : « Me voici, je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté » ! Et demandons l’intercession de Marie, mère du Christ et notre mère, selon les mots du pape François :

Vierge et Mère Marie, toi qui, mue par l’Esprit,

as accueilli le Verbe de la vie dans la profondeur de ta foi humble,

totalement abandonnée à l’Éternel,

aide-nous à dire notre “oui” dans l’urgence, plus que jamais pressante,

de faire retentir la Bonne Nouvelle de Jésus.

 

Toi, remplie de la présence du Christ, tu as porté la joie à Jean-Baptiste,

le faisant exulter dans le sein de sa mère.

Toi, tressaillant de joie, tu as chanté les merveilles du Seigneur.

 

Toi, qui es restée ferme près de la Croix avec une foi inébranlable

et as reçu la joyeuse consolation de la résurrection,

tu as réuni les disciples dans l’attente de l’Esprit

afin que naisse l’Église évangélisatrice.

 

Obtiens-nous maintenant une nouvelle ardeur de ressuscités

pour porter à tous l’Évangile de la vie qui triomphe de la mort.

Donne-nous la sainte audace de chercher de nouvelles voies

pour que parvienne à tous le don de la beauté qui ne se ternit pas. […]

Mère de l’Évangile vivant, source de joie pour les petits, prie pour nous. Amen. Alléluia !

(Pape François, Evangelii gaudium, n. 288)

« C’est donc à juste titre que les saints Pères considèrent Marie non pas simplement comme un instrument passif aux mains de Dieu, mais comme apportant au salut des hommes la coopération de sa libre foi et de son obéissance. En effet, comme dit saint Irénée, « par son obéissance elle est devenue, pour elle-même et pour tout le genre humain, cause du salut ». […] Cette union de la Mère avec son Fils dans l’œuvre du salut est manifeste dès l’heure de la conception virginale du Christ jusqu’à sa mort ; et d’abord quand Marie, partant en hâte pour visiter Élisabeth, est saluée par elle du nom de bienheureuse pour avoir cru au salut promis, tandis que le Précurseur tressaillait au sein de sa mère (cf. Lc 1,41-45) » (Conc. Vat. II, Lumen gentium, n. 56-57)

« Le soupir de tout cœur apostolique est tout entier là :  » Que (ton nom) soit sanctifié, que (ton règne) vienne, que ta volonté soit faite « . (Mt 6,9). Annoncer, propager, réaliser et défendre les saintes volontés de Dieu, afin qu’Il soit glorifié et que les âmes soient sauvées, voilà toute la mission.». (P. Manna, Virtù apostoliche, Bologne 1997, p. 253)

« Si nous voulons être de bons missionnaires, nous devons nous habituer, par une étude assidue de l’obéissance, à faire de la volonté de Dieu, la règle et le modèle de la nôtre. La volonté de Dieu est le principe et la raison de tout bien : en dehors de la volonté de Dieu, il y a le mal, le péché et la perdition. L’âme qui veut se consacrer à l’apostolat et sauver les âmes doit, par un esprit de grande obéissance, voir sa propre volonté se confondre avec celle de Dieu et être avec Lui comme si c’était une seule et même volonté.». (P. Manna, Virtù apostoliche, Bologne 1997, p. 255)

 

 

 

(Photo: Pexels.com / Hakan Hu)

 

 

 

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