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15ème dimanche du temps ordinaire (Année C)

« Va, et toi aussi, fais de même » : à l’école de Jésus le Maître, devenir le prochain sur le chemin missionnaire!
- Par le père Dinh Anh Nhue Nguyen, o.f.m. Conv.,
Secrétaire général de l'Union pontificale missionnaire

15ÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE (ANNÉE C)

Dt 30,10-14 ; Ps 18 ; Col 1,15-20 ; Lc 10,25-37

Les préceptes du Seigneur sont droits, ils réjouissent le cœur !

« Va, et toi aussi, fais de même » : à l’école de Jésus le Maître, devenir le prochain sur le chemin missionnaire !

L’Evangile avec les deux lectures bibliques d’aujourd’hui offre une fois de plus l’opportunité d’être à l’école de Jésus le divin Maître. L’épisode de l’Evangile rapporte un dialogue à la manière « scolastique » habituelle dans la tradition judéo-rabbinique, entre un rabbin-responsable du groupe (Jésus en l’occurrence) et son interlocuteur (ironiquement « un docteur de la Loi » juive). Il s’avère être une conversation très intéressante à suivre attentivement, pour (re)découvrir également la profondeur de la parabole du Bon Samaritain racontée, et surtout pour rafraîchir quelques points fondamentaux pour notre vie de disciples missionnaires de Jésus.

1. L’inquiétude humaine pour la vie éternelle et le don de la Parole de Dieu qui sauve

Le dialogue « scolastique » part d’une question fondamentale avec laquelle « un docteur de la Loi » voulait « mettre Jésus à l’épreuve » : « Maître, que dois-je faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? » Malgré l’éventuelle intention provocatrice, la question exprime néanmoins une inquiétude profonde et légitime qui circulait non seulement dans les débats parmi les rabbins ou plus généralement parmi les juifs au temps de Jésus, mais aussi dans le cœur des hommes et des femmes de tous les temps.

Par cela, au regard de cette « requête » légitime, Jésus, dans sa magnanimité habituelle, déjà vue face au rejet de certains Samaritains, n’a pas prêté attention à l’intention de l’interlocuteur (pour éviter de tomber dans une polémique inutile), mais est entré en dialogue pour faire resplendir l’enseignement autoritaire et authentique de Dieu. Conformément au style des écoles rabbiniques, Il n’a pas dicté immédiatement une réponse « pré-confectionnée », mais a répondu par une contre-question ou plutôt deux :« Dans la Loi, qu’y a-t-il d’écrit ? Et comment lis-tu ? » Ce sont deux questions complémentaires : la première concerne le contenu de l’enseignement de Dieu (quoi ?), tandis que la seconde, plus importante encore, concerne l’interprétation personnelle et la pratique qui en découle (comment ?).

Au-delà du style, le comportement de Jésus souligne en fait le point théologico-spirituel fondamental, comme il l’a lui-même déclaré : « Ne pensez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir » (Mt 5,17).

Par conséquent, toute enquête sur la vie éternelle, celle avec Dieu pour toujours, trouvera les indications justes et précises dans la Loi, la Torah en hébraïque, c’est-à-dire l’Enseignement (dans son ensemble), que Dieu a donné à Israël sur le mont Sinaï. C’est précisément sa Parole révélée pour le salut, qui dans sa richesse, son immédiateté, son accessibilité, est exaltée et recommandée par Dieu lui-même à travers Moïse : « Car cette loi que je te prescris aujourd’hui n’est pas au-dessus de tes forces ni hors de ton atteinte. Elle est tout près de toi, cette Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique » (Dt 30.11.14). La Loi / Torah est l’expression concrète de la miséricorde de Dieu pour le Peuple en cheminement, de sa Parole qui s’est rapprochée de tout homme et de toute femme pour indiquer les voies du salut.

2. Aimer Dieu et son prochain : la clé de la vie éternelle

De ce point de vue, lorsque le scribe a rappelé le double amour, celui de Dieu et du prochain, recommandé dans la Loi comme condition nécessaire et fondement de la vie éternelle, Jésus lui-même a dit avec autorité : « Tu as répondu correctement. Fais ainsi et tu vivras ». La Parole de Dieu dans la Loi a trouvé en Jésus, la Parole de Dieu incarnée, la confirmation, l’interprétation digne d’autorité et son plein accomplissement. Ainsi, en la personne de Jésus et dans sa mission sur terre, la Parole de Dieu est devenue encore plus proche, plus concrète, plus accessible pour la vie éternelle. Elle n’est en fait ni au ciel, ni au-delà de la mer, mais « est tout près de toi, elle est dans ta bouche et dans ton cœur ».

Désormais nous savons avec certitude que quiconque pratique l’amour de Dieu, de tout son être, son cœur, son âme, sa force, son esprit et l’amour du prochain aura la vie éternelle car, selon les paroles inspirées de saint Jean l’Apôtre, « Dieu est amour : qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui » (1Jn 4,16).

D’autre part, suivant l’enseignement de Jésus, l’apôtre saint Paul déclarera clairement : « le plein accomplissement de la Loi, c’est l’amour » (Rm 13,10; cf. Gal 5,14: « Car toute la Loi est accomplie dans l’unique parole que voici : Tu aimeras ton prochain comme toi-même »). La phrase peut se poursuivre en affirmant que la plénitude de l’amour, c’est précisément Jésus, car, nous l’avons entendu dans la deuxième lecture, « Il est l’Image du Dieu invisible » (Col 1:15) Et « car Dieu a jugé bon qu’habite en lui toute plénitude » (Col 1:19). Celui qui aime vit comme lui, avec lui et en lui.

3. « Va, et toi aussi, fais de même » : une parabole pour une mission qui dépasse toutes les limites

Face à la réponse claire de Jésus, la réaction du scribe qui voulait « se justifier » est surprenante. Pourquoi ? Tout est clair dans le double commandement de l’amour, mais le nœud réside dans la compréhension de la notion de « prochain » qui dans la même Loi signifie plutôt « le compatriote (juif) », celui du même peuple ou de la même religion juive. La précision demandée par le docteur de la loi « Et qui est mon prochain ? » a sa raison d’être et, en réalité, c’était aussi une occasion propice pour recevoir un enseignement révolutionnaire de Jésus, à travers la belle parabole dite « du bon Samaritain ».

L’homme laissé à moitié mort, décrit dans la parabole, était très probablement un Juif ou du moins certainement pas un Samaritain (car « il est descendu de Jérusalem » !). Mais cela n’a pas empêché le Samaritain de passage d’avoir de la compassion pour lui et de prendre soin du nécessiteux rencontré dans la rue, dépassant ainsi toute séparation ethnique ou religieuse existante. Remarquez la question de conclusion de Jésus :« Lequel des trois, à ton avis, a été le prochain de l’homme tombé aux mains des bandits ? » Jésus ne cherche pas à résoudre le problème, à définir « qui est mon prochain », comme le demande le scribe, mais indique plutôt la manière de devenir le prochain des autres dans le besoin, sans être conditionné par quoi que ce soit !

Il est curieux de voir que le docteur de la Loi dans sa réponse notait simplement : « Celui qui a fait preuve de pitié envers lui », presque comme s’il voulait éviter de mentionner le Samaritain. Néanmoins, cela suffisait à Jésus pour recommander simplement : « Va, et toi aussi, fais de même », pour accomplir le commandement de l’amour du prochain d’une manière vraiment divine. La perspective devient alors totalement universelle puis « active », tout comme celle de la règle d’or que Jésus lui-même a enseignée aux disciples comme résumé de toute la Loi et des Prophètes : « Tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux, vous aussi » (Mt 7:12)

Réfléchissant sur la recommandation du Christ aux disciples d’être ses témoins « jusqu’aux extrémités de la terre », le pape François déclare dans son Message pour la Journée Missionnaire Mondiale de cette année 2022 :

Aucune réalité humaine ne devrait être étrangère à l’attention des disciples du Christ dans leur mission. L’Église du Christ a été, est et sera toujours “en sortie” vers de nouveaux horizons géographiques, sociaux et existentiels, vers des lieux et des situations humaines “limites”, afin de témoigner du Christ et de son amour à tous les hommes et toutes les femmes de tout peuple, de toute culture et de tout statut social.

Et il ajoute à ce propos :

En ce sens, la mission sera toujours aussi missio ad gentes, comme nous l’a enseigné le concile Vatican II, car l’Église devra toujours aller au-delà, au-delà de ses propres limites, pour témoigner de l’amour du Christ à tous. À cet égard, je voudrais rappeler le souvenir et remercier les nombreux missionnaires qui ont dépensé leur vie pour aller “au-delà”, en incarnant la charité du Christ envers les nombreux frères et sœurs qu’ils ont rencontrés.

« Faire de même », comme le Bon Samaritain de la parabole, sera vraiment une suite authentique de Jésus, Verbe incarné et Compassion de Dieu en mission. Ce n’est pas un hasard si dans l’évangile de Luc, le verbe spécifique « avoir pitié« , en plus de revenir dans la parabole du fils prodigue pour souligner la réaction du père au retour du fils (cf. Lc 15 : 20), n’est à nouveau utilisé que pour décrire le sentiment du Christ lui-même face aux pleurs de la veuve de Naïn pour la perte de son fils unique (cf. Lc 7, 13). C’est pourquoi la Tradition de l’Église voit à juste titre dans le Bon Samaritain la figure du Christ qui s’est approché de chaque homme et de chaque femme pour prendre soin d’eux et se donner entièrement pour leur salut.

Prions donc pour que tous les disciples du Christ poursuivent cette mission de leur divin Maître, surtout en cette période mouvementée où l’Église est désormais devenue un hôpital de campagne dans le monde, pour reprendre une expression forte du pape François.

Marie, Mère du Christ, Mère de Miséricorde et de Compassion, prie pour nous. Amen.

Pape François, Lettre encyclique sur la fraternité et l’amitié sociale, tous frères.

67. Cette parabole est une icône éclairante, capable de mettre en évidence l’option de base que nous devons faire pour reconstruire ce monde qui nous fait mal. Face à tant de douleur, face à tant de blessures, la seule issue, c’est d’être comme le bon Samaritain. Toute autre option conduit soit aux côtés des brigands, soit aux côtés de ceux qui passent outre sans compatir avec la souffrance du blessé gisant sur le chemin. La parabole nous montre par quelles initiatives une communauté peut être reconstruite grâce à des hommes et des femmes qui s’approprient la fragilité des autres, qui ne permettent pas qu’émerge une société d’exclusion mais qui se font proches et puis réhabilitent celui qui est à terre, pour que le bien soit commun. […]

85. Pour les chrétiens, les paroles de Jésus ont encore une autre dimension transcendante. Elles impliquent qu’il faut reconnaître le Christ lui-même dans chaque frère abandonné ou exclu (cf. Mt 25, 40.45). En réalité, la foi mélange la reconnaissance de l’auteur sur des motivations inouïes, car qui croit pouvoir parvenir à reconnaître que Dieu aime chaque être humain d’un amour infini et qu' »il confère ainsi une dignité infinie ». À cela s’ajoute le fait que nous croyons que le Christ a versé son sang pour tous et pour chacun, raison pour laquelle personne ne se trouve hors de son amour universel.

Pape François, Discours au Congrès missionnaire des jeunes, promu par la Fondation « Missio » de la Conférence épiscopale italienne, Sala Clementina, 23 avril 2022

Un docteur de la Loi demande à Jésus : « Qui est mon prochain ? », et Jésus répond par la parabole du Bon Samaritain : un homme descend de Jérusalem vers Jéricho et en chemin est volé et battu par des brigands, et reste à moitié mort sur le bord de la route. Contrairement à deux ministres du culte, qui le voient mais passe à côté, un Samaritain, c’est-à-dire un étranger pour les Juifs de l’époque, qui n’avait pas beaucoup d’amitié avec eux, s’arrête et prend soin de lui. Et il le fait aussi de manière intelligente : il lui prodigue les premiers soins comme il peut, puis l’emmène dans une auberge et paie le propriétaire pour qu’il puisse être soigné dans les jours qui suivent. Quelques coups de pinceaux pour décrire un autre aspect de la mission, c’est-à-dire le deuxième verbe : prendre soin. C’est-à-dire vivre la charité de manière dynamique et intelligente. […] Combien de « bons samaritains » missionnaires ont vécu la mission en prenant soin des frères et sœurs blessés en cours de route ! A leur suite, avec le style et les méthodes propres à notre époque, il vous appartient maintenant de réaliser une charité discrète et efficace, une charité imaginative et intelligente,

Pape François, Audience générale, Mercredi, 27 avril 2016

La « compassion » est une caractéristique essentielle de la miséricorde de Dieu. Dieu a de la compassion pour nous. Qu’est-ce que cela veut dire ? Il souffre avec nous, il sent nos souffrances. Compassion signifie : « souffrir avec ». Le verbe indique que les entrailles s’émeuvent et tressaillent à la vue du mal de l’homme. Et dans les gestes et dans les actions du bon samaritain, nous reconnaissons l’action miséricordieuse de Dieu dans toute l’histoire du salut. C’est la même compassion avec laquelle le Seigneur vient à la rencontre de chacun de nous : Il ne nous ignore pas, il connaît nos douleurs, il sait combien nous avons besoin d’aide et de réconfort. Il vient près de nous et ne nous abandonne jamais. […]

Cette parabole est un merveilleux cadeau pour nous tous, mais elle est aussi exigeante ! À chacun de nous, Jésus répète ce qu’il dit au docteur de la Loi : « Va, et toi aussi, fais de même » (v. 37). Nous sommes tous appelés à parcourir le même chemin que le bon samaritain, qui est la figure du Christ : Jésus s’est penché sur nous, il est devenu notre serviteur, et ainsi, il nous a sauvés, afin que nous aussi, nous puissions nous aimer comme Il nous a aimés, de la même façon.

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