Avec Jésus, grandir en sagesse, en taille et en grâce
Avec Jésus, grandir en sagesse, en taille et en grâce
- Par le père Dinh Anh Nhue Nguyen, o.f.m. Conv., secrétaire général de l'Union pontificale missionnaire
DIMANCHE DE LA SAINTE FAMILLE (ANNÉE C)
1S 1,20-22.24-28 ; Ps 83 ; 1Jn 3,1-2.21-24 ; Lc 2,41-52
Avec Jésus, grandir en sagesse, en taille et en grâce
Nous avons célébré la naissance du Christ, et aujourd’hui, il a soudainement déjà 12 ans ! Nous avons à peine entendu et contemplé le tout premier son du cri de Jésus nouveau-né, et nous entendons aujourd’hui sa toute première déclaration, selon l’ordre des récits de l’évangile de Luc ! Et Jésus l’a fait à l’âge adulte, selon la tradition juive dans un contexte solennel : au Temple, au milieu des docteurs de la Loi, et devant ses parents. « Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ? Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? » (Lc 2,49). Ces paroles du Christ sont pour l’évangéliste Luc d’une importance fondamentale, car elles explicitent tout le sens de l’existence du Christ. Elles sont à méditer dans la joie de la naissance de Dieu-parmi-nous, pour en accueillir la profondeur et ainsi recueillir tout la signification pour une vie chrétienne-missionnaire avec et dans le Seigneur.
1. « Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ?» c’est ainsi que Jésus, âgé de douze ans, répond à sa mère qui lui dit ces paroles émouvantes après l’avoir retrouvé au Temple : « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois comme ton père et moi, nous avons souffert en te cherchant ! ». Cette façon de répondre d’un enfant à ses parents « affligés » est difficilement compréhensible, car elle n’est pas très humaine. Le « Fils » Jésus se comporte ici d’une manière extraordinaire et surhumaine. À cet égard, il faut rappeler que les récits évangéliques sont écrits pour transmettre avant tout des messages théologiques, et non pour offrir les détails de ce qui s’est passé comme dans un enregistrement audio-vidéo pour satisfaire la curiosité des lecteurs. Néanmoins, même sur le plan de la théologie, le comportement de Jésus ne semble pas ici être recommandé comme exemple pour les enfants au sein de la famille, surtout en ce jour de la fête de la Sainte Famille, à partir de laquelle nous voulons apprendre à vivre et à grandir en sainteté ! A ce sujet, il est bon de noter que les évangiles rapportent d’autres occasions avec une réaction similaire de la part de Jésus. Aux noces de Cana, lorsque sa mère l’informe du manque de vin, il répond : « Femme, que me veux-tu ? » (Jn 2,4). Lors de ses activités publiques, lorsqu’il a été informé de l’arrivée de sa mère avec ses frères-cousins qui voulaient le voir, il a de même répondu par une contre-question : « Qui est ma mère… ? (cf. Mc 3,33). Jésus n’était-il pas si gentil, doux, obéissant en famille ?
L’obéissance absolue de Jésus à ses parents n’est jamais remise en cause, expression concrète de l’honneur dû aux parents, prescrit dans le Décalogue. Tout de suite après, l’Évangile déclare : « Il descendit avec eux [Marie et Joseph] pour se rendre à Nazareth, et il leur était soumis. » (Lc 2,51). De même, la bonté et la douceur étaient ses propres caractéristiques que Jésus rappelle de lui-même : « je suis doux et humble de cœur » (cf. Mt 11, 29).
Pourquoi alors une telle réaction de Jésus dans cette situation et dans bien d’autres ? Peut-être aurait-il oublié les vertus évoquées ? Non, il ne les a pas oubliés par accident, mais l’espace d’un instant, il les a volontairement laissés de côté pour affirmer quelque chose de bien plus important ! Il a accueilli cette situation pour annoncer solennellement la raison de sa vie, la seule raison pour laquelle il est venu au monde :
2. « Il me faut être chez mon Père». La déclaration brille comme la première révélation verbale de Jésus au monde au sujet de sa « mission ». Chaque mot est donc rempli de sens sur lequel il nous faut réfléchir. Tout d’abord, l’expression « il me faut » de Jésus ne fait pas référence à une fatalité de circonstances ou à une contrainte d’en haut, mais indique plutôt la disponibilité à réaliser le plan divin qui lui a été confié, avec tout son cœur, sa pensée et son esprit. Depuis cette première fois, l’expression « il me faut » continue de résonner dans la bouche de Jésus lors de ses activités publiques, comme le rapporte notamment l’Évangile de Luc. Des 17 autres récurrences, la plus significative est précisément la déclaration au sujet de sa passion et sa mort à Jérusalem : « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, le troisième jour, il ressuscite.» (cf. Lc 9,22). C’est précisément le contenu concret du « devoir » que Jésus remplit selon ce que Dieu le Père lui a confié. La vie de Jésus est entièrement orientée vers un constant « être chez mon Père », c’est à dire « m’occuper des affaires du Père ». Dans cette dernière expression, il y a une certaine difficulté à comprendre le sens exact dans le grec original et, par conséquent, elle peut avoir plusieurs traductions modernes. Un premier sens est que Jésus déclare qu’il doit rester dans la maison du Père (qui est le Temple de Jérusalem) pour en prendre soin ; cela s’inscrit dans le contexte et avec le zèle dont Jésus fera preuve dans l’épisode de la purification du Temple. Un autre sens pourrait être qu’il doit se préoccuper des œuvres du Père, comme Jésus le déclarera ailleurs : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre » (Jn 4,34). Les deux interprétations reposent essentiellement sur la déclaration du Christ à Dieu le Père au moment mystique de son entrée dans le monde que nous avons entendu le dernier dimanche de l’Avent : « Je viens faire ta volonté », c’est-à-dire prendre soin de ta maison et des « choses » que tu me confieras.
Dans cette perspective, ce que Jésus a encore déclaré à 12 ans révèle la raison de sa venue au monde, et la comparaison avec des passages similaires nous fait entrevoir quelque chose d’encore plus profond. Quand Jésus dit « Il me faut être chez mon Père », il ne se réfère pas seulement aux actions concrètes à accomplir une chose, mais aussi et surtout la mission de toute une vie, comme en témoigne la première lecture pour le cas de Samuel, fils de Anne : « Il demeurera à la disposition du Seigneur tous les jours de sa vie » (1S 1,28). En effet, Jésus a été totalement « consacré » à Dieu de façon mystique dès son entrée dans le monde et « formellement » depuis sa Présentation au Temple quelques jours après sa naissance. Il s’agit donc d’une vie entièrement offerte en holocauste à Dieu ; une vie plongée dans la mission de Dieu à chaque instant, à chaque souffle jusqu’à la mort, et la mort sur la croix : « Il me faut », « Je dois » parce que « Je viens faire ta volonté », je m’offre moi-même ! Et ainsi, la vie de Jésus est toute une mission ! Il remplit non seulement lamission du Père, il la vit, et ce 24h/24 et 7j/7 ! Et, comme nous le savons, ses disciples seront attirés à vivre de la même manière. En effet, il dira expressément après la résurrection : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie ! » (Jn 20,21).
3. « Ne saviez-vous pas ? » Ces paroles, dans le texte de l’Évangile, précèdent la déclaration de la mission de Jésus, mais nous les méditons en dernier, inversant ainsi l’ordre de la phrase, car en réalité il s’agit d’une question qui dépasse l’apparence d’un reproche ou d’un rappel à Marie et Joseph ou, plus ou moins, une simple introduction au contenu de la révélation qui suivra (« Ne saviez-vous pas que…? »). C’est une invitation fondamentale à penser et repenser constamment, avec l’aide de la Parole de Dieu, sur le mystère de Jésus, de sa personne, de sa mission, car c’est le mystère de Dieu fait homme qui dépasse toujours tout schéma mental et toute sagesse humaine. C’était vrai pour Marie et Joseph ; c’est encore vrai aujourd’hui pour tous, mais surtout pour nous chrétiens et missionnaires, envoyés dans le monde pour annoncer le Christ ! Ici, il faut partir de l’attitude sage et humble du philosophe Socrate qui déclare : « Je sais que je ne sais rien ! », pour s’ouvrir à la nouveauté de Dieu qui sait sûrement toujours nous surprendre dans son amour. Nous devons suivre, encore mieux et de façon plus proche, l’exemple de Marie, Mère de Jésus, humble servante de Dieu, et de Joseph le juste : ne pas se sentir offensés devant les paroles parfois incompréhensibles de Jésus, mais garder toujours une attitude d’écoute et de contemplation pour le mystère donné. Même s’ils « ne comprenaient pas ce qu’il leur avait dit », Marie « gardait toutes ces choses dans son cœur », c’est-à-dire toutes ces paroles et actions pour y revenir sans cesse en ses pensées, en son esprit, avec son cœur.
Ainsi, la question rhétorique de Jésus, « Ne saviez-vous pas ? », devient une exhortation implicite à grandir dans notre connaissance de lui et donc dans notre sagesse pour discerner et faire « les choses du Père ». L’évangile dit qu’après avoir clairement déclaré sa mission de vie, Jésus, âgé de 12 ans, « grandissait en sagesse, en taille et en grâce, devant Dieu et devant les hommes ». Si c’est le cas avec Jésus, Dieu fait homme, qui osera prétendre qu’il n’a pas besoin de croissance ? Qui sera déjà si imbu de lui-même qu’il n’aura plus de place pour la sagesse divine en Christ ? L’avertissement est particulièrement opportun pour ceux qui pensent tout savoir de lui, ces « membres modernes de la famille » de Jésus, qui « savent » plus que Marie et Joseph et ne perdent donc pas de temps à écouter les autres, dont Jésus !
Soyons donc prudents ! Jésus, Dieu fait homme, était et est le mystère toujours plus grand ! Nous sommes tous appelés à grandir avec lui dans la sagesse, même en ce nouveau temps et en cette nouvelle année que Dieu nous donne, à vivre de manière plus sage et plus intensément notre vie d’enfants de Dieu, appelés à accomplir, voire à vivre la même mission de Jésus, le Fils du Père : Pour apporter le salut de Dieu à tous, jusqu’à l’extrémité de la Terre ! (cf. Is 49,6).
« Malgré tous les mystères et toutes les merveilles que les saints docteurs ont découverts ou que les saintes âmes ont contemplé ici-bas, la plus grande partie en reste encore à dire et même à concevoir. Ce qui est dans le Christ est inépuisable ! C’est comme une mine abondante remplie d’une infinité de filons avec des richesses sans nombre ; on a beau y puiser, on n’en voit jamais le terme ; bien plus, chaque repli renferme ici et là de nouveaux filons à richesses nouvelles ; ce qui faisait dire à saint Paul du Christ : Dans le Christ se trouvent cachés tous les trésors de la sagesse et de la connaissance de Dieu ». (S. Jean de la Croix, Le Cantique spirituel, 36, 3)
« Le petit Jésus est né de la Vierge Marie, a vécu en famille, et c’est précisément dans la famille de Nazareth qu’il a commencé la mission que le Père lui avait confiée. « Un enfant nous est né, un fils nous a été donné » (Is 9, 5). En lui une nouvelle ère s’est levée, en lui le monde a été recréé, en lui une nouvelle vie a été offerte à l’humanité, une vie rachetée par et en Christ ». (Pape Jean Paul II, Voyage Apostolique au Pakistan, aux Philippines, à Guam (USA), Japon et à Anchorage (USA), 19 février 1981)
« La gloire de Dieu, le salut du monde : c’est la grande œuvre que le Père Éternel a préparée, que le Fils Éternel a accomplie, que l’Esprit Saint a consolidée : les anges, les hommes et même les êtres matériels y coopèrent. C’est la grande chose que Jésus est venu accomplir sur terre, sacrifiant la richesse, la renommée, l’honneur et la vie pour son succès, s’engageant à rester avec amour parmi nous et, en y restant, à gagner un nombre copieux et infini de prédestinés. […] Et pouvons-nous, étant prêtres, être indifférents aux intérêts suprêmes de Jésus-Christ ? Certes, tout le monde ne ressentira pas la vocation des apôtres, l’enthousiasme des héros, les angoisses du martyre ; cependant, quels prétextes peut-on donner pour ne pas travailler sans cesse en faveur des Œuvres missionnaires ? » (P. Manna, Sacerdozio missionario, Rome 1937, pp. 49-50)
(Photo: Pexels.com / Mostafa Ft.shots)
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