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17ème dimanche du temps ordinaire (Année C)

Prier à l’école du Christ en mission
- Par le père Dinh Anh Nhue Nguyen, o.f.m. Conv.,
Secrétaire général de l'Union pontificale missionnaire

17ÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE (ANNÉE C)

Gn 18, 20-32 ; Ps 137 ; Col 2, 12-14 ; Lc 11, 1-13

Le jour où je t’appelle, réponds-moi, Seigneur

Prier à l’école du Christ en mission

Comme les deux derniers dimanches, l’Evangile nous met à l’école du Christ pour apprendre de lui un autre aspect fondamental de la vie d’un disciple: l’action de prier ou simplement le prier. Ici, j’utilise intentionnellement le verbe et non le substantif (prière), car l’enseignement de Jésus à ce sujet dans le passage de l’Évangile semble vouloir non pas clarifier le concept dans l’esprit des disciples, mais les aider à prendre l’habitude de prier en eux-mêmes, comme leur maître. Ce n’est pas un hasard si saint Luc, le seul parmi les évangélistes, souligne que tout part d’un contexte temporel particulier : « Il arriva que Jésus, en un certain lieu, était en prière. Quand il eut terminé, un de ses disciples lui demanda :  » Seigneur, apprends-nous à prier  » ». L’occasion était donc propice pour le Maître de Nazareth de communiquer à ses disciples, par l’exemple et par la parole, les trois points essentiels à suivre dans leurs prières.

  1. « Père, ton règne vienne» : la priorité de prier pour la venue du Règne de Dieu

En premier lieu, Jésus enseigne à ses disciples à prier Dieu avec un court texte, appelé plus tard dans la tradition chrétienne la prière du Notre Père. Contrairement à la version de l’Évangile de Matthieu utilisée dans la liturgie de l’Église, celle de Luc est plus courte et ne contient que cinq invocations : deux concernent la réalité divine et trois la réalité humaine. Chaque phrase de ce précieux et unique texte de prière, que Jésus a enseigné à ses disciples, contient une immense richesse à découvrir et à approfondir (lire la partie consacrée au Notre Père dans le Catéchisme de l’Église catholique [nn .2803 et suivants]). Nous ne rappelons ici qu’un aspect, le plus important concernant le caractère « missionnaire ».

En effet, dans les deux versions, après s’être adressé à Dieu avec l’appellation « Père », qui place l’orant dans une relation filiale particulière avec Dieu, la prière commence par deux demandes parallèles : celle de la sanctification de son nom et celle de la venue de son royaume. Ils sont en quelque sorte complémentaires, car là où Dieu règne, son « nom », c’est-à-dire lui-même, est « sanctifié » et « glorifié », c’est-à-dire reconnu comme saint et adoré comme tel (cf. Catéchisme de la Église catholique n° 2807). Nous pouvons entrevoir le grand désir de la cause de Dieu que Jésus portait constamment dans son cœur et qu’il veut transmettre à ses disciples. Lui-même a proclamé dès le début de ses activités publiques que « le règne de Dieu s’est approché » de façon dynamique.

Il convient de préciser que l’avènement du royaume de Dieu ne signifie pas l’établissement d’un territoire aux frontières visibles et sous contrôle. Cette venue implique plutôt la réalité/action que Dieu règne sur son peuple et, en général, dans le cœur des hommes et des femmes, précisément conformément à la tradition de l’Ancien Testament (qui utilise l’expression verbale « Dieu règne » bien plus que fréquemment de la « règne de Dieu »). Les mêmes textes de l’Ancien Testament expriment aussi l’attente du jour où Dieu viendra régner sur tout et sur tous. Ainsi, l’invocation de la venue du royaume de Dieu demande en réalité que Dieu réalise son dessein de salut dans le monde.

Le Notre Père se révèle donc avant tout comme une prière « missionnaire ». Ceux qui prient partagent le même désir de Dieu, qui est aussi celui du Christ, pour l’accomplissement de la missio Dei, cette mission de Dieu pour le bonheur de l’homme, qui a maintenant atteint la plénitude des temps avec la venue de Jésus, qui le prient souhaitent aussi pour lui-même et pour toute l’humanité le doux « joug du royaume », que Dieu règne dans sa vie, ainsi que dans la vie de chaque homme et femme dans le monde. Cette prière est la première action de la mission par excellence.

  1. Priez avec insistance et confiance filiale

Deuxièmement, Jésus enseigne à prier Dieu avec insistance et confiance filiale. Il le fait à travers une courte parabole, qui reflète divers aspects de la culture de son peuple : l’arrivée d’un ami sans préavis « à minuit » d’un voyage (il n’y avait pas de téléphone portable à cette époque), rester au lit avec ou près des enfants (selon la structure de la maison de l’époque), d’où la peur de les réveiller, et surtout le fait étrange que le propriétaire de la maison n’ait pas pensé à la possibilité de punir son ami intrusif en appelant la police.

En tout cas, comme le montre le contexte littéraire, l’attitude d’insistance dans la prière semble recommandée non pas tant pour chaque besoin de la personne qui prie (parfois seulement selon ses désirs humains), que précisément en vue de la demande des choses essentielles que Jésus avait enseignées dans le Notre Père, surtout cette invocation pour le royaume. Cette perspective s’appliquera également à l’affirmation de Jésus plus tard :« Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira » (Lc 11,9-10). Que demander, chercher, et chez qui frapper la porte? Il est important de rappeler à ce propos la recommandation même de Jésus: « Cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît » (Mt 6,33).

  1. « Prière » entièrement orientée vers le don du Saint-Esprit

Enfin, Jésus conclut sa « catéchèse » sur la prière avec l’indication de l’Esprit Saint comme le bien suprême à demander et à recevoir de Dieu : « Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père du ciel donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent ! » (Lc 11,13). Cela se laisse déjà entrevoir par le parallélisme entre les « bonnes choses » qu’un père terrestre sait donner à ses enfants et « l’Esprit Saint » que le Père céleste donnera à ceux qui le demandent. La pensée émerge plus clairement, si l’on compare cette version des paroles de Jésus avec celle de l’Évangile de Matthieu: « Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent ! » (Mt 7,11).

Ainsi, l’enseignement de Jésus dans la version lucanienne est encore plus riche, car il oriente tout vers le plus grand don que Dieu accorde à l’homme : l’Esprit Saint qui purifie, sanctifie et guide l’homme dans la vie avec Dieu et en Dieu. L’Esprit est, il y a Dieu présent qui règne ; le royaume de Dieu y est présent, c’est pourquoi prier Dieu pour le don du Saint-Esprit revient en fait à prier pour l’avènement du royaume de Dieu en nous-mêmes. Ce sera aussi l’Esprit qui nous aidera à entrer toujours plus dans la relation filiale avec Dieu que nous appelons désormais « Abba ! « , c’est-à-dire : Père ! » (Cf. Rm 8, 15-16), comme Jésus nous l’a enseigné.

Nous demandons donc que ce don suprême de Dieu qu’est l’Esprit Saint nous soit donné toujours et aussi aujourd’hui, avec la certitude que Dieu notre Père céleste nous le donnera. Et « guidés par l’Esprit de Jésus », nous pouvons élever chaque jour vers le Père les invocations essentielles de la prière du Notre Père avec insistance et confiance filiale, plaidant avec une force particulière pour que le Royaume de Dieu vienne parmi nous. Amen. 

CATÉCHISME DE L’ÉGLISE CATHOLIQUE

2781 Quand nous prions le Père, nous sommes en communion avec lui et avec son Fils, Jésus-Christ (cf. 1 Jn 1, 3). C’est alors que nous le connaissons et le reconnaissons dans un émerveillement toujours nouveau. La première parole de la Prière du Seigneur est une bénédiction d’adoration, avant d’être une imploration. Car c’est la Gloire de Dieu que nous le reconnaissions comme  » Père « , Dieu véritable. Nous lui rendons grâce de nous avoir révélé son Nom, de nous avoir donné d’y croire et d’être habités par sa Présence. 

2804 La première vague nous porte vers Lui, pour Lui : ton Nom, ton Règne, ta Volonté ! C’est le propre de l’amour que de penser d’abord à Celui que nous aimons. En chacune de ces trois demandes, nous ne  » nous  » nommons pas, mais c’est  » le désir ardent « ,  » l’angoisse  » même, du Fils bien-aimé pour la Gloire de son Père, qui nous saisit (cf. Lc 22, 14 ; 12, 50) :  » Que soit sanctifié … Que vienne … Que soit faite …  » : ces trois supplications sont déjà exaucées dans le Sacrifice du Christ Sauveur, mais elles sont tournées désormais, dans l’espérance, vers leur accomplissement final, tant que Dieu n’est pas encore tout en tous (cf. 1 Co 15, 28).

2807 Le terme  » sanctifier  » doit s’entendre ici, non d’abord dans son sens causatif (Dieu seul sanctifie, rend saint) mais surtout dans un sens estimatif : reconnaître comme saint, traiter d’une manière sainte. C’est ainsi que, dans l’adoration, cette invocation est parfois comprise comme une louange et une action de grâces (cf. Ps 111, 9 ; Lc 1, 49). Mais cette demande nous est enseignée par Jésus comme un optatif : une demande, un désir et une attente où Dieu et l’homme sont engagés. Dès la première demande à notre Père, nous sommes plongés dans le mystère intime de sa Divinité et dans le drame du salut de notre humanité. Lui demander que son Nom soit sanctifié nous implique dans  » le Dessein bienveillant qu’il avait formé par avance  » pour que  » nous soyons saints et immaculés en sa présence, dans l’amour  » (cf. Ep 1, 9. 4).

2809 La Sainteté de Dieu est le foyer inaccessible de son mystère éternel. Ce qui en est manifesté dans la création et l’histoire, l’Écriture l’appelle la Gloire, le rayonnement de sa Majesté (cf. Ps 8 ; Is 6, 3). En faisant l’homme  » à son image et à sa ressemblance  » (Gn 1, 26), Dieu  » le couronne de gloire  » (Ps 8, 6), mais en péchant l’homme est  » privé de la Gloire de Dieu  » (Rm 3, 23). Dès lors, Dieu va manifester sa Sainteté en révélant et en donnant son Nom, afin de restaurer l’homme  » à l’image de son Créateur  » (Col 3, 10).

Pape François, Audience Générale, Place Saint-Pierre, Mercredi, 22 mai 2019

Nous pouvons dire que la prière chrétienne naît de l’audace d’appeler Dieu du nom de «Père». C’est la racine de la prière chrétienne : dire «Père» à Dieu. Mais il faut du courage ! Il ne s’agit pas tellement d’une formule, mais plutôt d’une intimité filiale dans laquelle nous sommes introduits par la grâce : Jésus est le révélateur du Père et fait de nous ses proches. «Jésus ne nous laisse pas une formule à répéter machinalement. Comme pour toute prière vocale, c’est par la Parole de Dieu que l’Esprit Saint apprend aux enfants de Dieu à prier leur Père» (Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 2766). Jésus lui-même a utilisé différentes expressions pour prier le Père. Si nous lisons avec attention les Evangiles, nous découvrons que ces expressions de prière qui se dessinent sur les lèvres de Jésus rappellent le texte du «Notre Père». […]

En considérant le Nouveau Testament dans son ensemble, on voit clairement que le premier protagoniste de chaque prière chrétienne est l’Esprit Saint. Nous ne pourrions jamais prier sans la force de l’Esprit Saint. C’est lui qui prie en nous et il nous pousse à bien prier. Nous pouvons demander à l’Esprit qu’il nous enseigne à prier, parce qu’Il est le protagoniste, celui qui fait la vraie prière en nous. C’est Lui qui souffle dans le cœur de chacun de nous, qui sommes disciples de Jésus. L’Esprit nous rend capables de prier comme des enfants de Dieu, tels que nous le sommes réellement par le baptême. L’Esprit nous fait prier dans le «sillon» que Jésus a tracé pour nous. C’est le mystère de la prière chrétienne : par la grâce, nous sommes attirés dans ce dialogue d’amour de la Très Sainte Trinité. […] Pour prier nous devons nous faire petits, pour que l’Esprit Saint vienne en nous et que ce soit Lui qui nous guide dans la prière.

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