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20ème dimanche du temps ordinaire (Année C)

Proclamer la sagesse de la vie (la vie sage) en Dieu
- Par le père Dinh Anh Nhue Nguyen, o.f.m. Conv., Secrétaire général de l'Union pontificale missionnaire

20ÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE (ANNÉE C)

Jr 38, 4-6.8-10 ; Ps 39 ; He 12, 1-4 ; Lc 12, 49-53

Seigneur, viens vite à mon secours !

 

COMMENTAIRE BIBLIQUE ET MISSIONNAIRE

Le feu, le baptême et la paix du Christ

Les paroles de l’Evangile d’aujourd’hui suscitent pas mal de perplexité et nous avons du mal à comprendre, en particulier, ce qui concerne l’affirmation de Jésus qu’il n’apporte pas la paix, mais la division. Il y a trois déclarations fondamentales de Jésus et toutes visent à clarifier la vraie mission qu’Il accomplit.

  1. « Je suis venu apporter un feu sur la terre»: la mission du « feu » du Christ

Tout d’abord, celle de Jésus est une mission de « feu ». L’expression « Je suis venu… », utilisé ici comme à bien d’autres occasions, il témoigne d’une claire conscience de sa tâche. En effet, son cœur brûle tout pour cela, comme il l’explique lui-même ci-dessous :« et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé !» Mais de quel feu s’agit-il ?

En premier lieu, à partir de la déclaration de Jésus, nous pouvons voir que le feu apporté par lui « sur la terre » c’est logiquement le céleste, venant « du ciel ». C’est donc le feu divin, c’est-à-dire celui de Dieu pour le monde. Le langage de Jésus suit celui des prophètes d’Israël, et conformément à leur enseignement, le feu divin dont il parle symbolise la purification, le jugement et le salut final pour le monde. Dans cet esprit, Jean-Baptiste, le « plus grand des prophètes » et précurseur du Christ, avertit tout le monde du jugement imminent de Dieu par le feu, comme le rapporte saint Luc l’évangéliste lui-même :« Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu » (Lc 3,9). De plus, ce sera le Messie de Dieu qui exécutera le jugement final :« Il tient à la main la pelle à vanner pour nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera le grain dans son grenier ; quant à la paille, il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas » (Lc 3,17).

D’autre part, cette image de feu se réfère spontanément à la révélation de Dieu à Moïse dans le buisson ardent, tout comme le feu qui brûle dans le buisson, dans lequel et à partir duquel Dieu a déclaré sa mission pour le Peuple : « J’ai vu, oui, j’ai vu la misère de mon peuple qui est en Égypte, et j’ai entendu ses cris sous les coups des surveillants. Oui, je connais ses souffrances. Je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens et le faire monter de ce pays vers un beau et vaste pays, vers un pays, ruisselant de lait et de miel » (Ex 3,7-8). C’est donc le feu de l’amour miséricordieux que Dieu a toujours pour chacune de ses créatures.

Enfin, le feu ici pourrait aussi faire allusion à l’Esprit Saint qui descendra sur les apôtres comme des langues de feu (cf. Ac 2,1-3). Lui, l’Esprit de Dieu, est le don du Christ ressuscité que Dieu envoie dans le cœur des fidèles. Ce sera comme un feu qui purifie le cœur, illumine l’esprit et allume un amour ardent pour Dieu dans tout l’être.

Ce sera donc, en dernière analyse, le feu d’amour pour Dieu que Jésus maintenant a tant voulu qu’il soit déjà allumé en chaque personne. Dès lors, la mission du Christ en plus d’être « de feu » se révèle aussi être une mission « de feu », c’est-à-dire « ardente » (quelque chose qui met le feu) voire enflammée, flamboyante. Le feu que Jésus apporte sur la terre brûle déjà en lui ! On entrevoit ici l’âme de Jésus, toute tendue vers l’accomplissement de la mission qui lui a été confiée par le Père. Il désire ce que le Père veut : accomplir le plan de salut du monde selon la volonté de Dieu, le baptême qu’Il devra recevoir ensuite dans le Jourdain.

 

  1. «Je dois recevoir un baptême»: l’accomplissement de la mission et le zèle du Christ

À quel événement Jésus fait-il référence avec cette phrase ? A cet égard, il convient de rappeler que, comme nous l’avons expliqué précédemment à l’occasion du Baptême du Seigneur, « Le mot original grec pour « baptême » est « baptisma / baptismos » et vient du verbe « bapto » (avec la forme intensive « baptizo ») qui signifie principalement « immerger » ou « submerger ». Le substantif en question désigne alors avant tout un acte/bain d’« immersion/submersion ». […]

En gardant à l’esprit le sens de ce terme, nous pouvons comprendre la référence dans l’Évangile à un autre baptême de Jésus après celui du Jourdain. Déclarant : « Je dois recevoir un baptême » (Lc 12,50a), Jésus il renvoie donc à sa passion et à sa mort sur la croix, car Jésus reparlera de ce baptême, en le rattachant à l’action de boire le calice du Père (cf. Mc 10,50 ; 14,36 ; Jn 18,11). C’est une immersion totale, un baptême précisément, avec et dans « le sang et l’eau » pour ôter les péchés du monde (cf. Jn 19,34). Ce sera le baptême suprême du Christ, qui englobe tous les autres baptêmes, y compris celui du Jourdain. Ainsi, on pourra comprendre l’insistance mystérieuse de saint Jean dans une de ses lettres aux fidèles : « C’est lui, Jésus Christ, qui est venu par l’eau et par le sang : non pas seulement avec l’eau, mais avec l’eau et avec le sang » (1Jn 5,6a).

Dans cette perspective, nous comprenons l’annonce du Baptiste concernant le baptême que le Christ offrira au peuple : « Il vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu » (Lc 3,16). Cela fait allusion à une immersion très spéciale : dans l’Esprit Saint et dans le feu de la purification et du jugement divin. Son désir fort, voire « affligeant », de l’accomplissement de tout selon la volonté du Père. Alors le lien particulier entre le « baptême » du Christ et le « feu » apporté par lui sur la terre apparaît encore plus clairement. Et Jésus réaffirme : « quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli ! »

 

  1. « Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ?» : Une clarification nécessaire sur la mission de paix véritable

La troisième et dernière déclaration de Jésus est la plus difficile à comprendre, car elle est en contradiction avec les autres enseignements sur sa mission de paix. Déjà les Pères de l’Église, comme saint Jean Chrysostome, se demandaient à cet égard comment et dans quel sens Jésus avait dit ces paroles, alors qu’il avait lui-même recommandé à ses disciples de saluer, en entrant dans chaque maison : « Paix à cette maison » (Lc 10,5). De plus, à la naissance de Jésus, comme le rappelle saint Luc, les anges annonçaient avec joie « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime » (Lc 2,14) Jésus lui-même, lors de la Dernière Cène, a dit : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » (Jn 14,27). Pourquoi alors dans l’évangile d’aujourd’hui a-t-il dit qu’il n’apporte pas la paix, mais la division ?

Précisément à la lumière de tout l’enseignement de Jésus, notamment grâce à cette dernière citation (de Jn 14,27), on peut comprendre la phrase sur sa mission de non-paix. Ici, il veut clarifier le vrai caractère de sa mission : pour la vraie paix dans la vie en communion avec Dieu, et non la fausse des hommes dans une vie « paisible » sans Dieu. Il y a ensuite ceux qui acceptent avec foi cette vraie paix, annoncée par Jésus et donnée dans sa mission aboutissant à son « baptême » dans le sang et l’eau, et d’autres qui la rejettent. De cette façon, la division est créée dans la société et dans les familles face au message de salut de Dieu, en raison de la fermeture de l’homme dans sa liberté et malgré la volonté de Dieu « que tous soient sauvés » (cf. 1 Tm 2, 4). C’est la triste situation, déjà dénoncée par le prophète Michée dans l’Ancien Testament : « le fils insulte son père, la fille se dresse contre sa mère, la belle-fille contre sa belle-mère, chacun a pour ennemis les gens de sa maison » (Mi 7,6).

Les paroles de Jésus suivent donc encore celles des prophètes d’Israël, comme on l’a déjà vu dans le dicton précédent sur le « feu ». Ils sonnent comme un avertissement fort à ses disciples face à la situation prévisible de division qui se produisait de facto devant la figure de Jésus, signe de la contradiction. Tous sont alors invités, voire obligés à faire un juste discernement pour suivre le bien que Dieu offre en Jésus. Précisément pour cette raison, après le dire sur la division, Jésus dénonce l’incapacité de beaucoup d’”hypocrites » à discerner et juger ce qui est juste sur le niveau spirituel divin (cf. Lc 12, 54-56).

Prions pour que le Seigneur nous donne à ses disciples missionnaires d’aujourd’hui son saint désir, son zèle, son angoisse pour l’accomplissement de la mission de Dieu dans le monde. Puissions-nous avoir la grâce du discernement et de la persévérance dans l’adversité, « les yeux fixés sur Jésus, qui est à l’origine et au terme de la foi » (Hé 12,2), nous laisser enseigner et inspirer par ses paroles et ses actions. Et que nous puissions continuer à transmettre le feu de Dieu apporté par Jésus à tous et en tout lieu, jusqu’aux extrémités de la terre et jusqu’au bout du monde.

 

 

Points utiles :

Pape François, Angélus, Place Saint-Pierre, Dimanche 14 août 2016

Le feu dont parle Jésus [in Lc 12,49-53] est le feu de l’Esprit Saint, présence vivante et opérante en nous depuis le jour de notre baptême. […] Jésus désire que l’Esprit Saint se propage comme un feu dans nos cœurs, car ce n’est qu’en partant du cœur que l’incendie de l’amour divin pourra se propager et faire avancer le Royaume de Dieu. […] Si nous nous ouvrons complètement à l’action de ce feu qu’est l’Esprit Saint, Il nous donnera l’audace et la ferveur pour annoncer à tous Jésus et son message réconfortant de miséricorde et de salut, en navigant au large, sans peur. […]

Avec ce feu de l’Esprit Saint, nous sommes appelés à devenir toujours plus des communautés de personnes guidées et transformées, pleines de compréhension, des personnes au cœur ouvert et au visage joyeux. Aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin de prêtres, de consacrés et de fidèles laïcs ayant le regard attentif de l’apôtre, pour s’émouvoir et s’arrêter devant les malaises et les pauvretés matérielles et spirituelles, caractérisant ainsi le chemin de l’évangélisation et de la mission avec le rythme bienfaisant de la proximité. C’est précisément le feu de l’Esprit Saint qui nous conduit à devenir les prochains des autres, des personnes dans le besoin, de tant de pauvretés humaines, de tant de problèmes, des réfugiés, des déplacés, de ceux qui souffrent.

En ce moment, je pense également avec admiration en particulier aux nombreux prêtres, religieux et fidèles laïcs qui, dans le monde entier, se consacrent à l’annonce de l’Évangile avec un grand amour et une grande fidélité, souvent au prix de leur vie. Leur témoignage exemplaire nous rappelle que l’Église n’a pas besoin de bureaucrates et de fonctionnaires zélés, mais de missionnaires passionnés, dévorés par l’ardeur d’apporter à tous la parole réconfortante de Jésus et sa grâce. Cela est le feu de l’Esprit Saint.

Pape François, Angélus, Place Saint-Pierre, Dimanche 18 août 2019

Jésus avertit ses disciples que le moment de la décision est arrivé. Sa venue au monde, en effet, coïncide avec le temps des choix décisifs: on ne peut plus renvoyer l’option pour l’Evangile. Et pour mieux faire comprendre son rappel, il utilise l’image du feu que Lui-même est venu apporter sur terre. Il dit: «Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé!» (v. 49). Ces paroles ont pour but d’aider les disciples à abandonner toute attitude de paresse, d’apathie, d’indifférence et de fermeture pour accueillir le feu de l’amour de Dieu; cet amour qui, comme le rappelle saint Paul, «a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné» (Rm 5, 5). Parce que c’est l’Esprit Saint qui nous fait aimer Dieu et nous fait aimer le prochain; c’est l’Esprit Saint que nous avons tous en nous. […] Et ainsi, avec l’adoration de Dieu et le service au prochain — les deux ensemble, adorer Dieu et servir le prochain — l’Evangile se manifeste véritablement comme le feu qui sauve, qui change le monde à partir du changement de cœur de chacun.

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