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Le témoignage au Christ « de l’autre côté du Jourdain »

Le témoignage au Christ « de l’autre côté du Jourdain »
- Par le père Dinh Anh Nhue Nguyen, o.f.m. Conv., secrétaire général de l'Union pontificale missionnaire

3ÈME DIMANCHE DE L’AVENT (ANNÉE B) – DIMANCHE Gaudete

Is 61,1-2a.10-11; Lc 1,46b-48, 49-50, 53-54; 1Th 5,16-24; Jn 1,6-8.19-28

Le témoignage au Christ « de l’autre côté du Jourdain »

Le troisième dimanche de l’Avent est appelé dimanche Gaudete ou “Réjouissez-vous !”, du premier mot de l’antienne d’entrée de la messe. Nous sommes invités à nous réjouir, car la fête de la venue du Seigneur est maintenant proche, spirituellement et aussi littéralement. Dans ce contexte de joyeuse attente, l’évangile de ce jour nous exhorte encore à méditer sur saint Jean-Baptiste, décrit comme un « homme envoyé par Dieu » ce qui veut dire le « missionnaire » de Dieu qui « est venu comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière » Jésus, le Verbe divin.

Ainsi les détails de l’Evangile du jour ont une portée clairement missionnaire, en ce qu’ils nous aident à approfondir certains aspects fondamentaux du témoignage rendu par Jean à Jésus, celui qui vient. C’est pourquoi, une « lectio divina » du texte évangélique sera importante et utile pour nous tous chrétiens, appelés à être des témoins joyeux de Jésus Christ face au monde.

  1. « Je ne suis pas le Christ ». L’humble témoignage de Jean le Baptiste sur lui-même.

Avec la description de Jean comme « homme envoyé par Dieu » s’éclaire tout d’un coup la mission de Dieu pour le Baptiste (vf Jean 1,33 ; 3-28). Jean est « homme » mais il accomplit la mission divine avec l’autorité « céleste » pour « rendre témoignage à la Lumière » (v.7-8).

Donc s’ensuit la proclamation solennelle du nom ; Jean, qui signifie littéralement « Dieu a fait grâce ». Jean, le missionnaire est caractérisé aussi par l’affirmation suivante : « Il est venu comme témoin… », comme les affirmations propres de Jésus sur sa mission : « je suis venu pour que les brebis aient la vie, la vie en abondance » (cf. Jn 10,10; 12,47; Mc 10,45; Mt 20,28). Toutefois, il est précisé que « cet homme n’était pas la Lumière », et ainsi est anticipée la « formule de témoignage » du Baptiste devant les « envoyés » des chefs religieux de l’époque : « Je ne suis pas le Christ, ni Élie, ni le Prophète » (vv.20.21.25). Jean le Baptiste est toutefois une petite « lanterne », « la lampe qui brûle et qui brille » (Jn 5,35) et ainsi il rend témoignage au Christ qui est la Lumière du monde (Gv 8,12; 9,5; cf. 3,19).

Pour répondre à ceux qui l’interrogent sur son identité (« Qui es-tu ? » v.19-22) (comparable à l’interrogatoire que Jésus subit devant le Sanhédrin pendant son procès), Jean le Baptiste livre avec courage et sincérité son témoignage sur lui en deux phases, d’abord sur celui qu’il n’est pas (v. 19-21) et puis sur celui qu’il est (v. 22-23). Dans la première partie il faut noter la construction de la phrase qui fait ressortir la confession-négation de Jean « Je ne le suis pas… » qui ainsi fait contraste avec les sept déclarations propres de Jésus dans l’annonce « Je suis » (pain de vie, lumière du monde, bon pasteur… dans l’évangile de Jean), ainsi qu’avec la propre confession de Jésus dans Marc 14,61 (« Es-tu le Christ ? » – « Je le suis »).

Les demandes des chefs religieux concernent l’identité des personnages eschatologiques : le Christ, c’est-à-dire le Messie, l’oint roi davidique de la fin des temps ; Élie, celui qui prépare la venue du jour du Seigneur (cf Mt 3) ; le Prophète, être eschatologique puissant comme Moïse, prédit dans Dt 18. Jean-Baptiste décline ces identités, pour mettre en avant celui qu’il est (v.22-23) ; la voix, comme saint Augustin l’a commenté « Jean est la voix qui passe, le Christ est le Verbe éternel qui était au commencement » (Disc. 293, 3 ; PL 1328-1329). C’est la confession de sa mission, sans prétendre à une quelconque dignité, comme l’avait souligné saint Bonaventure qui parle d’une affirmation de l’humble vérité. L’humilité du Baptiste est répétée au verset 27 (« je ne suis pas digne de délier la courroie de sa sandale »).

C’est ainsi que Jean le Baptiste nous guide aujourd’hui sur notre propre témoignage du Christ pour le livrer au monde dans notre mission évangélisatrice. Il faut toujours reconnaître que nous ne sommes pas le Christ, ni quelque prophète divin qui sauve le monde. Il faut toujours dépasser la concentration excessive sur soi-même, sur notre personne, sur notre vision, sur nos projets qui nous font oublier que nous sommes de simples serviteurs du Christ, celui qui doit venir. Nous devons nous rappeler l’enseignement du pape François dans le Message pour la Journée mondiale des missions 2022 :

C’est du Christ, et du Christ ressuscité dont nous devons témoigner et dont nous devons partager la vie. Les missionnaires du Christ ne sont pas envoyés pour se communiquer eux-mêmes, pour montrer leurs qualités et leurs capacités de persuasion ou leurs compétences en matière de gestion. Ils ont, au contraire, le grand honneur d’offrir le Christ, en paroles et en actes, en annonçant à tous la Bonne Nouvelle du salut avec joie et franchise, comme les premiers apôtres.

  1. « Mais au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas ». Le témoignage de Jean le Baptiste sur le Christ, le mystérieux “inconnu” celui qui vient après.

De manière étrange, le témoignage de Jean sur le Christ n’affirme rien sur l’identité de « celui qui vient après moi ». Toutefois, de manière indirecte, dans le contexte de l’interrogatoire et du témoignage, ce mystérieux « inconnu » celui-qui-vient est, à la différence de Jean, « le Christ ». En effet, lui est le Seigneur, le chemin pour lequel Jean le Baptiste appelle tous à se préparer et à se redresser.

Dans la réponse de Jean le Baptiste à la question « Pourquoi donc baptises-tu ? » la première phrase semble incomplète (« je baptise dans l’eau »). Cela laisse un suspense dans la narration et on trouvera son achèvement ensuite dans Jean 1,33 : « celui qui m’a envoyé baptiser dans l’eau m’a dit : “Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer, celui-là baptise dans l’Esprit Saint”» (cf. Mc 1,7-8). Ici, dans la première allusion au Christ, Jean le Baptiste s’arrête sur l’idée du Messie qui reste caché, inconnu, jusqu’à son apparition officielle à Israël. Devant la grandeur du Christ, le Baptiste reconnaît de nouveau son indignité ; « je ne suis pas digne de délier la courroie de sa sandale » (phrase devenue caractéristique de Jean et que l’on retrouve dans Ac 13,25). Il y a encore la construction « je ne suis pas » (!) devant celui qui vient et qui est « digne, de prendre le Livre et d’en ouvrir les sceaux » (Ap 5,9).

Le témoignage du Baptiste est donc la totale négation de lui-même pour l’affirmation totale du Christ. Le Baptiste conclura en fait son témoignage dans Jn, par le fait qu’il n’est pas lui le Christ (cf. Jn 3,28), par la phrase dans le contexte de la joie qui se réalise en entendant la voix du Christ l’époux :

Vous-mêmes pouvez témoigner que j’ai dit : Moi, je ne suis pas le Christ, mais j’ai été envoyé devant lui. Celui à qui l’épouse appartient, c’est l’époux ; quant à l’ami de l’époux, il se tient là, il entend la voix de l’époux, et il en est tout joyeux. Telle est ma joie : elle est parfaite. Lui, il faut qu’il grandisse ; et moi, que je diminue. (Jn 3,28-30)

Lui doit grandir ; moi, au contraire, je dois diminuer (Jn 3,30). C’est la joie de l’Évangile, la joie des missionnaires authentiques de Dieu et du Christ. Que Lui grandisse toujours dans le cœur de ceux que nous servons, et nous nous diminuons jusqu’à la sortie complète de la scène, comme Jean-Baptiste.

  1. « De l’autre côté du Jourdain ». La note de conclusion significative sur le lieu du témoignage.

Le passage de l’Evangile se termine avec une note apparemment neutre ou visiblement insignifiante sur le contexte géographique du témoignage de Jean : « Cela s’est passé à Béthanie, de l’autre côté du Jourdain ». On parle d’un lieu mystérieux et inconnu jusqu’à ce jour (avec beaucoup d’hypothèses entre temps), mais qu’on ne doit pas confondre avec Béthanie voisine de Jérusalem où se trouve la maison de Marthe, Marie et Lazare.

Toutefois, avec la précision « de l’autre côté du Jourdain » cette indication géographique prend davantage d’importance pour deux raisons. D’abord, cela ramène à Jn 10,40 (« [Jésus] repartit de l’autre côté du Jourdain, à l’endroit où, au début, Jean baptisait ; et il y demeura » ), pour boucler de manière significative un beau récit. Depuis ce lieu, Jésus commence son activité et il la finit aussi là, avant d’affronter le dernier temps de la mort et de la résurrection, annoncé dans l’épisode de Lazare (cf Jn 11). Ensuite, l’expression « de l’autre côté du Jourdain » rappelle la position du peuple élu avant d’entrer dans la Terre promise. C’est le lieu de l’attente, l’attente joyeuse, parce que la destination est déjà là devant, visible, observable, perçue après un long chemin. En ce lieu nous sommes tous invités à nous rendre spirituellement ; nous immerger dans la situation du peuple élu pour pouvoir comprendre la joie de l’arrivée à destination, du salut désiré depuis longtemps.

Prions pour que le Seigneur renouvelle en ces jours la sagesse et la joie de l’Évangile dans l’attente de Noël désormais proche, pour que, comme Jean-Baptiste, nous puissions témoigner humblement et courageusement du Christ Sauveur qui vient pour donner à tous la paix et la joie de Dieu. 

Pape François,  Angélus, dimanche 17 décembre 2017

Ces derniers dimanches, la liturgie a souligné ce que signifie se mettre dans une attitude de veille et ce qu’implique concrètement de préparer le chemin du Seigneur. En ce troisième dimanche de l’Avent, dit «dimanche de la joie», la liturgie nous invite à saisir l’esprit avec lequel tout cela arrive, c’est-à-dire, justement, la joie. Saint Paul nous invite à préparer la venue du Seigneur en assumant trois attitudes. Ecoutez-bien: trois attitudes. D’abord, la joie constante; deuxièmement, la prière persévérante; troisièmement, l’action de grâce permanente. Joie constante, prière persévérante, action de grâce permanente.

La première attitude est la joie constante: «Restez toujours joyeux» (1 T 5, 16), dit saint Paul. Cela signifie rester toujours dans la joie, même quand les choses ne vont pas selon nos désirs. […]

Les angoisses, les difficultés et les souffrances traversent la vie de chacun, nous les connaissons tous; et souvent, la réalité qui nous entoure semble être inhospitalière et aride, semblable au désert dans lequel retentissait la voix de Jean-Baptiste, comme le rappelle l’Evangile d’aujourd’hui (cf. Jn 1, 23). Mais précisément les paroles de Jean-Baptiste révèlent que notre joie repose sur une certitude, que ce désert est habité: «Au milieu de vous — dit-il — se tient quelqu’un que vous ne connaissez pas» (v. 26). Il s’agit de Jésus, l’envoyé du Père qui vient, comme le souligne Isaïe, «porter la nouvelle aux pauvres, panser les cœurs meurtris, annoncer aux captifs la libération et aux prisonniers la délivrance, proclamer une année de grâce de la part de Yahvé» (61, 1-2). Ces paroles, que Jésus fera siennes dans le discours de la synagogue de Nazareth (cf. Lc 4, 16-19), expliquent que sa mission dans le monde consiste dans la libération du péché et des esclavages personnels et sociaux qu’il produit. Il est venu sur la terre pour redonner aux hommes la dignité et la liberté des enfants de Dieu, que Lui seul peut communiquer, et à travers cela, pour donner la joie.

La joie qui caractérise l’attente du Messie se fonde sur la prière persévérante: c’est la deuxième attitude. Saint Paul dit: «Priez sans cesse» (1 Ts 5, 17). Au moyen de la prière, nous pouvons entrer dans une relation stable avec Dieu, qui est la source de la véritable joie. La joie du chrétien ne s’achète pas, elle ne peut pas s’acheter: elle vient de la foi et de la rencontre avec Jésus Christ, raison de notre bonheur. […]

La troisième attitude indiquée par Paul est l’action de grâce permanente, c’est-à-dire l’amour reconnaissant à l’égard de Dieu. Il est en effet très généreux avec nous, et nous sommes invités à toujours reconnaître ses bienfaits, son amour miséricordieux, sa patience et sa bonté, en vivant ainsi dans une action de grâce incessante. […]

 

 

(Photo: Flickr / Bob Mendelsohn)

 

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